Évaluation, Publications
Publication du rapport d'évaluation de l'Inserm
Publié le
Le rapport d'évaluation de l'Inserm est rendu public sur le site internet du Hcéres.
L’évaluation a été réalisée par un comité d'évaluation composé de huit experts de cinq nationalités, reconnus pour leur excellence scientifique, leur expérience dans le management d'établissements d'enseignement supérieur et de recherche, et leur connaissance du monde de la santé et de la recherche biomédicale (voir composition in fine). La période de référence de l'évaluation est 2019-2023. Le rapport d'auto-évaluation a été préparé par l'Inserm sur la base du Référentiel d’évaluation des organismes de recherche du Hcéres, complété par un document spécifique intitulé « Éléments de problématique pour l'évaluation 2024-2025 de l'Inserm », rédigé par le Hcéres en étroite collaboration avec l'Inserm et rendu public en mars 2024 sur le site internet du Hcéres. Le rapport d'auto-évaluation de l'Inserm a été remis au Hcéres en octobre 2024.
La visite d'évaluation s'est déroulée au siège de l'Inserm à Paris du 2 au 4 avril 2025. Son programme comprenait des entretiens avec des personnes de l'Inserm et des unités de recherche de l'Inserm, ainsi qu'avec des représentants d’institutions publiques et privées partenaires de l'Inserm. Le comité d'évaluation a également visité quelques unités de recherche situées à Paris.
Le comité d'évaluation a identifié les principaux sujets de l’évaluation comme suit :
- rôle et missions de l'Inserm en France,
- qualité de la recherche, stratégie et politique scientifiques,
- relations avec les universités et les hôpitaux universitaires*, et implication dans les politiques des sites,
- innovation et relations avec les entreprises,
- engagement européen et coopérations internationales,
- science dans la société,
- gouvernance, organisation, management et fonctionnement.
* * *
L'Inserm, première institution de recherche française dans le domaine de la santé, jouit d'une excellente réputation en Europe et dans le monde entier. Le rapport d'autoévaluation montre que l'Inserm est ambitieux et vise à être moderne et innovant, tout en soutenant l'excellence de la recherche. Dans plusieurs domaines clés, à savoir l'innovation et la coopération avec les entreprises, la participation aux programmes européens de recherche et d'innovation, et l’inscription de la science dans la société, l'Inserm a remarquablement amplifié ses actions et amélioré ses résultats au cours de la période évaluée.
Le comité d'évaluation a constaté que le mandat confié en 2024 à l'Inserm par le gouvernement pour créer la nouvelle « agence de programmes de la recherche en santé » est une priorité pour la direction de l'Inserm, qui a assuré à cette agence de programmes un bon démarrage. La principale recommandation du comité à cet égard est de définir une stratégie claire pour séparer le rôle de l'Inserm en tant qu'agence de programmes de son rôle en tant qu'opérateur de recherche. Il est également recommandé de séparer le budget et la gouvernance de l'agence de programmes du budget et de la gouvernance de l'Inserm en tant qu’opérateur de recherche, et de mettre en place des dispositifs de travail clairs pour les prochaines étapes de l'agence de programmes. Son objectif doit être de définir un nombre limité de programmes de recherche, tout en accordant une attention particulière à la
transparence et en saisissant les opportunités de simplification et de réduction de la fragmentation des financements.
En ce qui concerne la qualité de la recherche à l'Inserm, le comité recommande de développer la culture et la pratique de l'évaluation de la recherche au niveau international en sollicitant systématiquement l'avis d'experts étrangers pour l'évaluation des chercheurs et en développant des comparaisons internationales. En outre l'Inserm, en tant qu'opérateur de recherche, devrait définir une stratégie scientifique claire, incluant des priorités explicites. La santé des populations est identifiée comme l'une de ces priorités, l'objectif étant de hisser l'Inserm au meilleur niveau international au cours des cinq prochaines années. De plus, l'Inserm est invité à établir un plan d'action ambitieux afin de se positionner comme un leader dans la transformation numérique de la recherche en santé. Le comité suggère également que la préparation aux pandémies fasse partie intégrante de la stratégie de l'Inserm.
Le comité recommande vivement que l'Inserm, en tant qu'opérateur de recherche, s’attache à améliorer les relations avec les universités et les hôpitaux universitaires en se plaçant dans une perspective où les universités jouent un rôle de « chef de file », sur le modèle des exemples internationaux. Cela devrait s'accompagner d'une gouvernance modernisée et d'une gestion simplifiée des unités de recherche, dans le cadre d'un partenariat approfondi entre l'Inserm et les universités intensives en recherche. Cela devrait également s'accompagner d'initiatives visant à améliorer la recherche clinique et à renforcer les synergies entre les universités et les hôpitaux universitaires.
Au-delà de la poursuite des efforts pour renforcer sa participation aux programmes de recherche et d'innovation financés par l'Union européenne, l'Inserm est encouragé à définir et à mettre en œuvre une stratégie européenne forte et visible, assortie de priorités ciblées, notamment des partenariats stratégiques avec des acteurs publics et privés européens de premier rang dans le domaine de la recherche et de l'innovation en santé. Il est suggéré que cette stratégie européenne soit élaborée en coordination avec les universités françaises partenaires afin de s’appuyer sur certains des réseaux « d’universités européennes », qui transforment de plus en plus les partenariats académiques en Europe.
Les analyses et recommandations du comité d'évaluation concernent aussi l'organisation, le management et le fonctionnement de l'Inserm. L'organisation interne gagnerait à être clarifiée et actualisée dans la perspective du développement de l'agence de programmes. L'Inserm devrait améliorer le fonctionnement de sa direction nationale en mettant en place des mécanismes clairs de reporting, de fixation d'objectifs et d'évaluation annuelle pour tous les directeurs, avec une meilleure coordination et des synergies accrues entre les instituts thématiques, et avec un rôle renforcé du comité de direction en tant qu'organe décisionnel. Le comité recommande de mieux utiliser l'affectation des chercheurs et l'allocation de la dotation budgétaire des unités de recherche comme leviers pour la mise en œuvre de la stratégie scientifique de l'Inserm. De plus, la politique des ressources humaines de l'Inserm devrait être renforcée en intégrant pleinement le personnel contractuel, en établissant une perspective pluriannuelle précise pour l'évolution des emplois et des compétences, et en renforçant le mentorat pour tous les employés permanents. Enfin, le comité a observé que le manque de clarté et de lisibilité du budget et des comptes de l'Inserm, ainsi que l'absence persistante de comptabilité analytique, ne permettent pas d'évaluer la soutenabilité de la situation financière de l’institution.
À l'issue de son évaluation, le comité a formulé 15 recommandations principales et a identifié les principales forces et faiblesses de l'Inserm.
Recommandations principales
Ces recommandations s'adressent principalement à l'Inserm en tant qu'opérateur de recherche. Certaines d'entre elles s'adressent à l'agence de programmes récemment créée, d'autres à l’État en vue de la préparation du contrat entre l'Inserm et l'État pour la période 2026-2030. Les recommandations 1, 4, 6, 7 et 12 sont de la plus haute priorité.
- Recommandation 1 : Distinguer et séparer l'agence de programmes et l'Inserm en tant qu'opérateur de recherche. Clarifier la gouvernance, les objectifs et les mécanismes de fonctionnement de l'agence de programmes, dans le but de donner la priorité à un nombre limité de programmes de recherche, et accorder une attention particulière à la transparence et aux opportunités de simplification et de réduction de la fragmentation des financements.
- Recommandation 2 : (adressée à l'État et à l'Inserm) Établir une perspective pluriannuelle claire pour le budget de l'agence de programmes et le budget de l'Inserm en tant qu'opérateur de recherche.
- Recommandation 3 :
- (adressée à l'agence de programmes) Établir avec tous les partenaires une stratégie nationale cohérente pour les plateformes et les équipements de recherche en santé, ainsi qu'une feuille de route commune pour sa mise en œuvre.
- (adressée à l'État) Mettre en œuvre un effort de financement cohérent et soutenu pour les plateformes, y compris les équipements technologiques de pointe, les plateformes de données, les biobanques et les cohortes.
- Recommandation 4 : Développer la culture et la pratique de l'évaluation de la recherche au niveau international en sollicitant systématiquement l'avis d'experts étrangers pour l'évaluation des chercheurs et en développant des comparaisons internationales. Renforcer les efforts visant à faire en sorte que l'évaluation des chercheurs s'éloigne des indicateurs quantitatifs et valorise de manière appropriée toutes leurs contributions aux missions de l'Inserm.
- Recommandation 5 : Définir une stratégie scientifique pour l'Inserm en tant qu'opérateur de recherche, comprenant des priorités explicites et des orientations claires pour sa mise en œuvre.
- Mettre en place une stratégie ambitieuse en matière de santé publique, avec l’objectif de hisser l'Inserm au meilleur niveau international au cours des cinq prochaines années.
- Mettre en place un plan d'action ambitieux pour positionner l'Inserm comme leader dans la transformation numérique de la recherche en santé.
- Recommandation 6 : À partir d'expérimentations sur certains sites sélectionnés, installer une nouvelle « plateforme de dialogue » au niveau des sites, partagée entre l'université, l'hôpital universitaire, l'Inserm et d'autres partenaires, et pilotée par l'université du site, dans le but d'élaborer une stratégie unifiée de recherche en santé pour le site.
- Recommandation 7 : Engager des progrès rapides et significatifs pour améliorer la collaboration et approfondir les partenariats avec les universités.
- En collaboration avec les universités, responsabiliser les directeurs d'unités de recherche et renforcer leur capacité à jouer un rôle de leader notamment en participant activement aux décisions, en exerçant une influence réelle sur l'évolution des objectifs de recherche de l'unité et en mobilisant les ressources correspondantes.
- En collaboration avec les universités, établir un système de gouvernance partagée clair pour les unités mixtes de recherche.
- Décentraliser autant que possible les processus opérationnels et les décisions relatives à l'allocation des ressources aux unités de recherche, afin que ces décisions puissent être prises en concertation avec les universités partenaires.
- Encourager les chercheurs Inserm à contribuer à la formation et leur en donner les moyens.
- Définir un cadre commun pour la consolidation des données et informations de gestion à tous les niveaux : unités, site et national.
- Établir des objectifs communs et des indicateurs consolidés au niveau des sites universitaires.
- Recommandation 8 : Clarifier le rôle de l'Inserm dans la recherche clinique au niveau national et international, d'une part, et au niveau des sites, d'autre part. En tant qu'agence de programmes, mettre en place un programme visant à soutenir les initiatives locales les plus prometteuses en matière de recherche clinique. Étendre les outils tels que les « contrats d'interface » et les bourses « Atip-Avenir » aux médecins et aux chercheurs impliqués dans la recherche clinique.
- Recommandation 9 : Tout en préservant soigneusement l'efficacité et le professionnalisme de son organisation actuelle avec la filiale Inserm Transfert, installer au sein de l'Inserm une véritable capacité à définir et à suivre sa stratégie d'innovation, et réfléchir à la manière de réduire les risques et inconvénients potentiels de cette organisation.
- Recommandation 10 : Élaborer et mettre en œuvre une stratégie européenne forte et visible avec des priorités ciblées, notamment le développement de partenariats stratégiques avec des acteurs européens majeurs − publics et privés − dans le domaine de la recherche et de l'innovation en santé, en coordination avec les universités partenaires françaises. Élaborer une stratégie internationale cohérente donnant la priorité à un nombre limité de partenariats stratégiques avec des institutions de premier plan au niveau mondial.
- Recommandation 11 : Pour mieux relier les rapports d'expertise collective à l'actualité et leur donner plus d'impact, revoir le processus décisionnel et la méthodologie, les publier en anglais et les faire connaître plus largement en Europe.
- Recommandation 12 : Élaborer une feuille de route pour la préparation à une épidémie majeure, en décrivant comment les objectifs, les processus de travail et la stratégie de communication de l'agence de programmes et de l'Inserm en tant qu'opérateur de recherche devraient être adaptés en cas de future pandémie similaire à la crise du Covid-19.
- Recommandation 13 : Clarifier l'organisation interne et améliorer la capacité de management de la direction de l’Inserm grâce à des mécanismes de reporting, de définition d'objectifs et d'évaluation annuelle pour tous les directeurs, à une meilleure coordination et à des synergies accrues entre les instituts thématiques, et au renforcement du rôle du comité de direction en tant qu'organe décisionnel.
- Recommandation 14 : Intégrer pleinement les agents contractuels dans la vision que l'Inserm a de lui-même et dans sa politique de ressources humaines. Établir une perspective pluriannuelle détaillée pour le développement des emplois et des compétences du personnel contractuel.
- Recommandation 15 : Améliorer la clarté et la lisibilité du budget et des comptes, élaborer un plan pluriannuel détaillé pour l'évolution des recettes et des dépenses, et mettre en œuvre sans délai une comptabilité analytique.
Forces
- Une réputation d’excellence établie, en France, en Europe et à l'échelle internationale.
- Un recrutement compétitif de haut niveau pour les chercheurs permanents, avec environ 27 % de non français parmi les chercheurs nouvellement embauchés.
- Un engagement fort en faveur de l'innovation, un bilan remarquable – que ce soit en matière de création d'entreprises, de transfert de technologies ou de partenariats avec des entreprises privées – et un professionnalisme reconnu.
- Une forte dynamique de participation aux programmes de recherche et d'innovation financés par l'Union européenne.
- Un engagement fort pour contribuer aux politiques publiques et inscrire la science dans la société.
- Un effort substantiel ces dernières années en matière de rémunérations, afin d'accroître l'attractivité pour les meilleurs scientifiques.
- Un bon démarrage pour l'agence de programmes.
Faiblesses
- Manque de clarté de la vision de l'Inserm concernant son positionnement et son rôle dans l'écosystème français de recherche en santé.
- Capacité limitée à distinguer clairement les deux rôles de l'Inserm en tant qu'agence de programmes et en tant qu'opérateur de recherche.
- L'Inserm n'a pas tiré les leçons de la crise du Covid-19 et n'a pas produit de document pour la préparation à une possible future pandémie.
- Absence de stratégie claire sur de nombreuses questions telles que les priorités scientifiques, la stratégie européenne au-delà de la participation aux programmes de l'Union européenne et la coopération internationale.
- L’évaluation de la recherche est centrée sur la France.
- Manque d’ouverture de la culture d’établissement et réticence au changement. L’Inserm n’est pas en capacité de se projeter dans une perspective où les universités deviennent des chefs de file de la recherche au niveau local et régional.
- Absence de vision claire sur le rôle de l'Inserm dans le pilotage des unités de recherche.
- Nécessité de clarifier et d'actualiser l’organisation interne en vue du développement de l'agence de programmes. La direction nationale est affaiblie par des dispositifs insuffisants de reporting et de fixation d'objectifs, et par un déficit de coordination.
- Manque de clarté et de lisibilité du budget et des comptes, et absence persistante de comptabilité analytique, rendant impossible l'évaluation de la soutenabilité financière.
|
Composition du comité d'évaluation
|
* Comme son équivalent anglais utilisée dans le rapport d’évaluation (university hospitals), l’expression « hôpitaux universitaires » désigne ici à la fois les centres hospitaliers universitaires (CHU) et les institut hospitalo-universitaires (IHU).