Evaluation, Publications

Publication du rapport d'évaluation de l'Agence nationale de la recherche

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Le Hcéres publie le rapport d’évaluation de l’Agence nationale de la recherche.

Le rapport d’évaluation de l’Agence nationale de la recherche est rendu public sur le site internet du Hcéres.

 

L’évaluation a été réalisée par un comité d’évaluation composé de 9 membres français et européens reconnus pour leur excellence scientifique et leur expérience de management d’institutions de recherche ou d’agences de financement de la recherche.

  • Véronique Halloin, secrétaire générale du Fonds de la recherche scientifique (Belgique), présidente du comité ;
  • Sylvain Allano, directeur scientifique de la société Flying Whales ; 
  • Jean-François Carpentier, professeur de chimie à l’Université de Rennes ; 
  • Virginie Courtier-Orgogozo, directrice de recherche en biologie à l’institut Jacques Monod (Centre national de la recherche scientifique, Université Paris Cité) ; 
  • Kostas Glinos, consultant indépendant, ancien chef de l’unité Science ouverte à la direction générale recherche et innovation de la Commission européenne ; 
  • Louis-Augustin Julien, directeur général délégué aux ressources d’Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement ; 
  • Angelika Kalt, directrice du Fonds national suisse de la recherche scientifique ;
  • Mickaele Le Ravalec, directrice de la direction Économie et veille d’IFP Énergies nouvelles ;
  • Emmanuelle Picard, professeure en histoire contemporaine à l’École normale supérieure de Lyon.

 

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La période 2019-2023 couverte par l’évaluation a été marquée par la promulgation en décembre 2020 de la loi de programmation de la recherche et l’inscription dans cette loi d’une trajectoire de forte hausse du budget d’intervention de l’Agence nationale de la recherche, ainsi que par le lancement en 2021 du plan France 2030 avec un accroissement des financements gérés par l’Agence nationale de la recherche dans le cadre des programmes d’investissements d’avenir. Le rapport annexé à la loi de programmation de la recherche et le contrat d’objectifs et de performance signé entre l’État et l’Agence nationale de la recherche pour la période 2021-2025 fixent des objectifs ambitieux pour l’action de l’Agence, au nombre desquels l’objectif emblématique d’atteindre un taux de sélection des projets de 25 % en 2024 pour l’appel à projets générique, avec une cible de 30 % à l’horizon 2027-2030.

 

Dans ce contexte, le comité d'évaluation a porté une attention majeure à l'impact de cette trajectoire de croissance sur l'activité de financement de recherche de l'Agence nationale de la recherche, et à la dynamique de l'Agence pour atteindre les objectifs du Contrat d'objectifs et de performance 2021-2025 et pour répondre aux attentes des différentes parties prenantes. Le comité a notamment analysé :

  • le rôle et le positionnement de l'Agence ;
  • les instruments de l'Agence et leur mise en œuvre ;
  • la gouvernance, l'organisation et le fonctionnement internes.

 

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Le comité d’évaluation estime que l’Agence nationale de la recherche a été « au rendez-vous » de la croissance attendue de son activité de financement de projets de recherche, et des attentes élevées dont elle faisait l’objet. Il relève ainsi que les principaux effets attendus ont été observés : 

  • Les objectifs du Contrat d'objectifs et de performance 2021-2025 concernant la progression du taux de sélection des projets ont été atteints. En 2023, le taux de succès est de 25,2 %. 
  • Le taux du préciput versé par l’Agence aux laboratoires et aux établissements en complément du financement des projets, en augmentation constante sur la période 2021-2023, atteint 30 % en 2023. 

Le comité note d’autres éléments importants dont la croissance du nombre de projets financés chaque année – proche de 1500 en 2018-2029, supérieur à 2000 durant la période 2021-2023 – et l’augmentation du montant moyen du financement attribué par projet de recherche – proche de 350 k€ par projet en 2018-2019, porté à 420 k€ par projet en 2022-2023. Le comité salue ces résultats remarquables et souligne la bonne performance de l’Agence en matière de gestion de ses moyens humains et financiers.

 

Le comité relève que l’Agence nationale de la recherche a aussi réalisé dans la période 2019-2023 des progrès importants sur d’autres plans. Elle a mené des actions pour mieux ouvrir ses appels à projets à certaines communautés scientifiques qui y participaient peu, notamment dans le domaine des sciences humaines et sociales. Elle a fortement accru son implication aux niveaux national, européen et international, sur plusieurs aspects des politiques de recherche, par exemple sur la science ouverte, l'éthique, l'intégrité scientifique ou l'évaluation de la recherche. Elle a aussi amélioré ses processus d’évaluation et de sélection des projets, et engagé avec succès plusieurs démarches visant à simplifier, pour ses bénéficiaires, le dépôt, l’évaluation, le financement et le suivi des projets. Au total – sans oublier que ses analyses le conduisent à identifier plusieurs sujets sur lesquels il estime que l’Agence nationale de la recherche doit progresser – le comité estime que l’Agence a accompli au cours de la période d’évaluation un chemin très important et s’est montrée remarquablement à la hauteur des responsabilités que le législateur et l’État lui ont confiées dans le cadre de la loi de programmation de la recherche.

 

Le comité considère toutefois que l’Agence nationale de la recherche doit encore faire face à plusieurs enjeux stratégiques en affirmant davantage son positionnement auprès des différents acteurs de la recherche et de la société, en contribuant à renforcer l’apport de la science pour les politiques publiques, en amplifiant ses actions pour conforter la place de la science dans la société, et en améliorant ses relations avec le secteur privé et son soutien à l’innovation. Le comité considère aussi que l’Agence doit poursuivre ses efforts pour mieux porter, dans le cadre de ses actions, des aspects essentiels de politique de la recherche : l’intégrité scientifique, l’éthique, la science ouverte (en particulier l’ouverture des données), l’égalité entre les femmes et les hommes, et les enjeux de développement durable. Le comité préconise que l’Agence développe une approche plus large et systématique afin d’évaluer l’ensemble des impacts de ses actions pour la recherche et la société françaises, et qu’elle communique davantage sur ces impacts. 

 

Le comité estime par ailleurs important que l’Agence continue de veiller avec le plus grand soin à optimiser ses processus d’évaluation et de sélection des projets, qu’elle accroisse encore la transparence de ses pratiques et de ses décisions, et qu’elle poursuive ses efforts de simplification des démarches administratives pour les porteurs de projets et les établissements. Sur un autre plan, elle doit poursuivre son implication forte sur les enjeux européens et son engagement, avec ses homologues européens et internationaux, dans les réflexions et les travaux sur les évolutions globales de la recherche et de l’innovation. 

 

Le comité d’évaluation considère que l’Agence nationale de la recherche joue désormais un rôle essentiel dans le paysage de la recherche française en soutenant la recherche fondamentale et appliquée et qu’elle s’inscrit dans une dynamique très positive. Grâce à l’investissement majeur consenti par l’État en sa faveur et à la mobilisation de ses équipes, elle est passée en quelques années d’une situation où elle était fragile à une situation où ses actions et la qualité de ses pratiques sont aujourd’hui au niveau des meilleurs standards internationaux. 

 

Cependant, le comité d’évaluation souligne que la transition qui suit une période de forte croissance est toujours délicate. Il recommande vivement à l’État de donner à l’Agence nationale de la recherche dans le Contrat d'objectifs et de performance 2026-2030 une visibilité sur l’évolution pluriannuelle de son budget d’intervention, avec une trajectoire budgétaire qui soit aussi proche que possible de celle qui était fixée dans la loi de programmation de la recherche et qui, à tout le moins, permette à l’Agence de conforter les progrès réalisés ces dernières années.

 

Le comité d'évaluation a identifié 12 recommandations principales adressées à l’Agence nationale de la recherche et à l’État. Il a également identifié les principales forces et faiblesses de l'Agence.

 

Recommandations principales

  • Recommandation 1 (adressée à l’État et à l’ANR) : Amplifier la programmation et la mise en œuvre des actions de l’ANR destinées à renforcer l’apport de la recherche en appui aux politiques publiques portées par l’État et les autres collectivités publiques.

  • Recommandation 2 : Adapter et faire mieux connaître les instruments orientés vers le soutien à l’innovation et aux partenariats entre les laboratoires publics et les entreprises, et explorer le potentiel de collaborations avec les autres acteurs, notamment les centres techniques.

  • Recommandation 3 : Amplifier et pleinement intégrer dans les missions de l’Agence les actions visant à conforter la place de la science dans la société.

  • Recommandation 4 : Pour assurer dans la durée la pertinence des actions de l’Agence, renforcer son dialogue avec l’ensemble des parties prenantes concernées par la recherche et ses apports pour la société : communautés scientifiques et sociétés savantes ; universités, écoles et organismes ; collectivités publiques ; entreprises ; acteurs de la société civile.

  • Recommandation 5 (adressée à l’État) : Clarifier les rôles de l’ANR et de chacune des agences de programmes, en veillant à la lisibilité du dispositif, en évitant toute complexité supplémentaire pour les équipes de recherche, et en confortant la place de l’ANR comme l’acteur central du financement de projets de recherche sur une base « investigator- and curiosity-driven ». 

  • Recommandation 6 : Mener une réflexion approfondie pour se mettre en capacité d’évaluer et de mesurer l’ensemble des impacts des actions de l’ANR pour la recherche et pour la société, et communiquer largement sur ces impacts.

  • Recommandation 7 : Mener régulièrement une réflexion sur l’ensemble des instruments de financement pour vérifier et améliorer leur pertinence et leur lisibilité.

  • Recommandation 8 : Poursuivre les efforts de promotion des bonnes pratiques de recherche concernant l’intégrité scientifique, la déontologie, l’éthique, la conduite responsable des recherches et l’égalité entre femmes et hommes. Mener des actions plus ambitieuses et affirmées pour l’intégration des pratiques de la science ouverte dans les projets de recherche, en particulier concernant l’ouverture des données.

  • Recommandation 9 : Poursuivre la démarche d’amélioration et de simplification des processus d’évaluation, de sélection, de financement et de suivi des projets de recherche et des services apportés aux porteurs de projets, aux laboratoires et aux établissements, et accroître encore la transparence des processus de l’ANR.

  • Recommandation 10 : Développer dans les meilleurs délais une réflexion large sur l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les activités de l’ANR, et renforcer le pilotage transversal des projets numériques.

  • Recommandation 11 : Poursuivre la réflexion sur une gouvernance interne plus intégrée et performante, structurer et dynamiser le management intermédiaire, et approfondir les actions visant à valoriser les talents.

  • Recommandation 12 (adressée à l’État et à l’ANR) : Dans le Cop pour la période 2026-2030 : 

    • donner à l’ANR une visibilité sur l’évolution pluriannuelle de son budget d’intervention, en assurant une trajectoire budgétaire qui lui permette de conforter les progrès réalisés ces dernières années ; 

    • fixer des objectifs-cibles sur les nombres de projets financés, sur le financement moyen alloué par projet, et sur le préciput versé aux établissements et aux laboratoires.

Forces

  • L’ANR est l’acteur central du financement de la recherche en France. Elle soutient la recherche dans l’ensemble des disciplines et des domaines scientifiques. Ses actions contribuent à la qualité et au rayonnement international de la recherche française. 

  • Les objectifs qui étaient attachés à la forte hausse du budget de l’Agence fixée dans la LPR ont été atteints, et l’Agence a su remarquablement gérer la croissance de ses activités. La qualité de ses actions et de ses pratiques est au niveau des meilleurs standards internationaux. 

  • L’Agence est fortement engagée sur des enjeux majeurs des politiques de recherche au niveau national, européen et international, tels que l’implication européenne des équipes françaises ; les pratiques de recherche responsable ; la science ouverte ; l’égalité entre femmes et hommes. 

  • L’ANR a amélioré de façon significative ses processus d’évaluation et de sélection, et simplifié ses procédures pour le dépôt, le financement et le suivi des projets de recherche. 

  • Les organes de gouvernance de l’ANR exercent leur rôle de façon pertinente. L’ANR fait preuve d’un fonctionnement efficient, avec des moyens correctement proportionnés. 

  • Les équipes de l’Agence sont reconnues pour leurs compétences, leur professionnalisme et leur engagement. Le climat social est sain. 

  • Les actions de l’ANR jouissent d’une bonne reconnaissance de la part des bénéficiaires des financements et des partenaires internationaux. 

Faiblesses

  • Les impacts des actions de l’ANR sont insuffisamment définis et explicités. Leur analyse est limitée au champ des publications scientifiques.

  • Les actions de l’Agence contribuant à l’appui des politiques publiques sur la recherche scientifique et visant à conforter la place de la science dans la société restent nettement en deçà des enjeux. 

  • Sa connaissance insuffisante du monde des entreprises ne permet pas à l’ANR de pleinement soutenir l’innovation et les coopérations entre la recherche publique et les acteurs socio-économiques. 

  • Malgré des efforts de communication avérés, la perception et la connaissance des actions et des évolutions de l’Agence restent partielles et inégales au sein des communautés scientifiques. 

  • La transparence des critères et des processus d’évaluation de l’Agence est améliorable. 

  • La démarche de l’ANR en matière de science ouverte est positive mais insuffisante concernant l’ouverture des données et logiciels produits par les projets. Son action pour favoriser la prise en compte des enjeux du développement durable dans les projets de recherche est également trop limitée. 

  • Les systèmes d’information et les outils numériques restent fragmentés. L’ANR n’a pas une vision intégrée, ni une capacité de pilotage unifié concernant les évolutions à conduire dans les prochaines années. 

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